Arrivée d'une soeur probable et de mauvaise humeur...

Pleine de poussière et l'air grognon, Vamp traînait des pieds aux côtés du jeune homme qui l'accompagnait. Depuis quelque minutes, depuis qu'elle apercevait les grilles du manoir en faite, elle ne cessait de se frotter le bras, signe chez elle d'anxiété. Elle faisait beaucoup moins la maligne à présent. Elle voyait les grilles se rapprocher lentement... mais trop vite à son goût. Tout les ongles de sa main droite étaient à présent inexistant, et ceux de sa main gauche suivaient le même chemin. Après réflexion, elle ne savait pas du tout sur qui elle allait tomber... Un noble pompeux ? Avec tout plein de dentelle totalement inutile autour des poignets. La jeune femme se sentie alors très mal. Elle déglutit et se rapprocha de son compagnon de voyage. Chanda tirait la langue et la minette avait disparut dans un arbre. Prise de pitié, elle prit le louveteau et le déposa dans sa besace. Elle releva les yeux, observant l’homme mais il ne sembla pas s’intéresser à elle, concentré sur la route. Elle se demandait à quoi il pouvait bien penser. Elle se rapprocha plus, l’air de rien, glissant un de ses doigt sur le dos de la main du jeune homme, ayant besoin d’être rassurée, mais bien trop fière pour le montrer. Elle enfouit donc ses sentiments au plus profond d’elle, comme on lui avait appris, elle resta stoïque, le menton relevé, elle s’arrêta face à la grille, incapable de faire le moindre geste.

Dolmance était enveloppé dans un grand habit noir, il se promenait dans ses jardins.
De plus en plus, les fleurs se fanaient et les arbres prenaient cette si mélancolique couleur rousse. Ainsi, le borgne allait de bosquet en bosquet, flânant presque au gré du vent, croisant par-ci par-là des domestiques et des amis.
Il arriva donc près des écuries jouxtant l'entrée du Castel.
Armand était en train de roupiller dans la conciergerie, le borgne sourit à cette image. Il dégrafa sa cape et en couvrit le corps du vieil homme.
Ensuite, il marcha dans les écuries où il prit une brosse, il se mit alors à brosser doucement le crin noir de son étalon.
Il entendit alors des pas derrière lui sur les pavés de pierre, et sans se retourner, il fit :

-Bienvenue au Castel Larose, puis-je vous aider ?

Lin avait accepté d'accompagner Vamp jusque chez ce qu'il avait compris pouvoir être son frère. Un grand frère, un homme du même nom qu'elle, découvert plus ou moins grâce à une lettre...
Les détails restaient flous, il n'avait pas cherché à en savoir plus. A quoi bon vouloir apprendre sur quelqu'un qui n'était peut être qu'un simple inconnu ?
Il réfléchissait à cet homme qui avait écrit à la jeune femme qui marchait à ses côtés. Un homme qui devait avoir des doutes à éclaircir ... Ou juste un manque de famille à combler ... Ou encore une envie de rencontre ... Ou tout simplement était-il bien le frère de Vamp ...
Il était sans aucun doute un homme qui ne manquait de rien se prit-il à penser lorsqu'il avisa les herses plus loin devant.
Il se mordilla l'intérieur de la joue, habitude qu'il avait pris étant gamin lorsqu'il s'angoissait ... Sa joue finissait plus ou moins bien en fonction du dénouement.
Il espéra un instant que cet inconnu n'avait rien d'un aristocrate prétentieux et snobinard, sans quoi Lin éviterait soigneusement les prochaines rencontres.
Il marmonna quand il se rendit compte qu'il avait un peu trop forcé sur sa peau et desserra les dents, décidé à afficher un air détendu et serein en présence de ce messire-là.
Sans se rendre compte de ses gestes, il laissa Vamp le devancer légèrement et se posta derrière elle, effleurant son dos de la main, moins pour signifier sa présence que son soutien.
La distance aux grilles se réduisant au fur et à mesure de leurs pas, Lin inspira profondément et porta un regard sur Vamp, léger sourire aux lèvres.
Que ce soit son frère ou non, il savait qu'elle resterait elle-même jusqu'au bout ...
Rasséréné, il soupira discrètement et enfonça ses mains dans ses poches, attendant de voir le potentiel frangin de la jeune femme.

La jeune femme, droite et le menton légerement relevé, gémissait intérieurement. Bon diou d'Aristote que faisait elle là ? Elle jeta un coup d'oeil à Lin, mais celui ci ne semblait pas avoir l'intention de vouloir faire demi tour. Elle ne put cacher une grimace et se raidit, se maudissant d'avoir accepté de participer à toute cette mascarade. Et puis après reflexions, cet homme ne pouvait pas être son frêre... Elle sentit une main qu'elle connaissait bien lui effleurer le dos et finit par se détendre. Elle était reconnaissante à Lin de l'avoir accompagnée. Habituée à être indépendante, la jeune femme avait réchigner à son intention de l'accompagner mais avait ressentie un profond sentiment de soulagement, que bien sûr, elle ne montra pas.

Une voix s'éleva, plutôt agréable à l'oreille. Vamp cependant, se renfrogna et répondit de mauvaise grace.

- Mmmoui... Je viens voir le... le...

La jeune femme fit de grand geste de la main, cherchant des mots raffinés. Elle finit par hausser les épaules et de lancer à l'homme qu'elle pensait être un écuyer.

- Mouai bon... Dites mon brave gars, pourriez vous nous mener à l'humble Majesté qui séjourne entre ses murs ?

Le ton était ironique et largement moqueur. Elle penserait à ses bonnes manières lorsqu'elle serait en face du probable futur frangin.

Dolmance brossant le cheval, s'entendit être appelé "Mon brave". Il sourit. Cela faisait longtemps que personne n'osait lui parler ainsi, -à part sa femme et ses amis ivrognes, cela s'entend-, et à vrai dire cela lui plu.
Il lui vint alors l'envie de faire quelque peu durer le plaisir. Il donna encore quelques coups de brosses et se retourna vers l'homme et la femme qui était devant lui. Il se courba dans une profonde révérence qu'il réservait d'habitude aux Ducs et aux Duchesses.
L'œil gris de Dolmance se ficha sur le visage pâle de la jeune femme. Il avait comme l'impression de l'avoir déjà vu... dans un passé assez lointain en fait...

-Bien Madame, mais permettez-moi de vous demander le motif de votre venue et la personne que je dois annoncer à Monseigneur.

L'homme s'inclina devant elle. Elle sourit, amusée. Puis son regard croisa le sien. Elle le reconnut de suite. La jeune femme sourit plus franchement, une expression de réelle affection dessinant ses traits. Elle montrait rarement ses affections, plus généralement son animosité envers les gens. Mais le souvenir de l'homme qui lui faisait face était tel, qu'elle ne put s'empêcher de sourire avec sincérité. Elle ne l'avait croisé que deux fois en taverne, il y a bien longtemps en Savoie. Elle se précipita vers lui.

- Messiiire Dooolmaaance !

Elle l'étreignit brièvement avant de lui donner une rude accolade dans le dos, souriante. La journée ne serait peut être pas aussi amère qu'elle le promettait... Elle observa de ses yeux noir l'homme qui lui faisait face, sceptique. Dans son souvenir, s'était plutôt quelqu'un d'aisé, et non un simple garçon d'écurie. Elle haussa les épaules et releva le menton, prenant un air faussement hautain.

- Eh bien mon cher, aller quérir à votre tyran que Damoiselle... hum.. que Dame Brâncusi attend dehors, qu'elle a fait un très long périple semé d'embûches pour se présenter devant lui et qu'elle est (elle maugréa entre ses dents) impatiente de faire la connaissance de ce fameux noble.

Elle lui fit une horrible grimace qui en disait long sur son avis à propos de cette rencontre et lui sourit. Intérieurement, cependant, une petite voix narquoise lui disait qu'elle était tombée dans le panneau...

Le borgne accueillit la jeune damoiselle dans ses bras, c'est quand elle avait quitté soudain sa voix faussement hautaine, qu'il l'avait reconnu !

-Vampirette ! Mon Dieu, comme cela fait plaisir de te revoir !

C'est vrai, il ne l'avait pas vu depuis longtemps. Ils s'étaient croisé lorsqu'il était parti pour Bourg en compagnie de... enfin laissons cela. C'était très étrange, mais Dolmance durant ce voyage avait immédiatement eut de l'affection pour la jeune fille. Et la voilà devant lui, et elle venait voir le seigneur de Séez et elle disait s'appeler Bra... Attendez.... Voilà une nouveauté dans le scénario de la Famille Larose !

-Dame Brâncusi ? Tu es la fille de ... ?

Son œil s'ouvrit grand, il fixait le visage de la jeune femme. Ce n'était pas possible se disait-il... Il doit y avoir une faille dans les tablettes du Maître du Jeu ? Le scénariste a sans doute picolé ? Mais non cher Dolmance, et même si c'était vrai, cela ne te regarde en rien.
Dolmance battit de la paupière et parvint enfin à articuler quelque mot :

-Brâncusi de Valachis ?

Il retira de son visage son bandeau noir, comme pour regarder la jeune fille de ses deux yeux :

-Mon nom est Dolmance Hercule Giacomo Larose, Seigneur de Séez...

Lin regardait les deux compères faire étalage de leurs sentiments respectifs et de leur affection réciproque, un sourire ironique étirant ses lèvres, resté en arrière durant cette effusion plus ou moins extravagante.
La jeune femme avait l'air de déjà connaître ce sieur depuis pas mal de temps et lui même eut l'air ahuri de quelqu'un qui revoit pour la première fois depuis cinquante ans son aïeule sortie du fin fond d'on ne sait où.
Devant ce tableau quelque peu comique, Lin détourna la tête, cachant son visage hilare en feintant l'absorption dans la contemplation du chemin qu'il venait de parcourir. Si cet homme avait un lien quelconque avec Vampirette, il était évident qu'il ne s'en rendait compte qu'à l'instant, alors même qu'il l'avait déjà rencontrée.
Le jeune barbu prit une profonde inspiration avant de se retourner vers eux, haussant les sourcils à la vue de l'homme sans bandeau. Première fois qu'il voyait un homme cyclope ...
Il haussa les épaules, rejetant tous préjugés et s'appuya contre la grille, curieux d'entendre la suite des présentations.
Même perdu entre tous ces noms, il ne comptait pas laisser tomber ...
Il finirait bien par y comprendre quelque chose ... ou pas.
Aucune importance, la situation apparemment plus complexe que prévu lui plaisait bien et, à défaut d'être informé de tous les rebondissements antérieurs, il était décidé à profiter quelque peu de cette rencontre peu commune.

Le coeur de Vamp rata un battement. La jeune femme déglutit et recula jusqu'à ce que son dos heurte Lin. Les yeux noirs fixaient ceux gris de l'homme. Elle eut soudain très chaud. Non seulement Dolmance venait de lui dévoiler son identité mais en plus de cela elle venait de se ridiculiser. La jeune femme se raidit, l'envie de partir lui venant mais sa fierté l'en empêchait. Elle déglutit et tentant de rester maîtresse d'elle même, se redressa. Dit quelque chose... Aller n'importe quoi...

- Je...

Les mots ne sortaient pas, restaient bloqués au fond de sa gorge. Lin... Dis quelque chose... S'il te plait... Vamp ressentie un grand moment de solitude... Et dire que cette journée ne faisait que commencer...

- Joli manoir...

Vamp... Bon dieu qu'est ce que tu racontes ? La jeune femme ferma les yeux, avec un peu de chance, quand elle les rouvrirait, Dolmance aura disparu...

Passé sa première stupeur, Dolmance vit que la jeune fille était on ne peut plus gênée, il avança alors vers elle et lui ouvrant grand les bras, il l'enlaça.
C'était étrange... Dolmance avait cru que sa sœur se serait présentée d'une autre manière, il s'attendait à une autre personne évidement, mais cela était au mieux.
Il lu embrassa le front :

-Comme je suis heureux que tu sois Brâncusi de Valachis, je craignais une petite sœur impossible et je te rencontre toi. Quelque fois le hasard fait vraiment bien les choses.

Il lui sourit tendrement et voyant par dessus la tête de Vamp, un homme qui se tenait debout, il fit à la jeune fille :

-Mais présentes moi donc ton ami, qu'il ne reste pas simple spectateur de nos retrouvailles...

Son étreinte la supéfia et elle se raidit. Peu habituée à ce genre d'effusion, la pauvre femme s'empourpra, finissant de la mettre mal à l'aise. Elle observa ses yeux gris. C'était un bel homme. Vamp sentie une bouffée de fierté en ayant un frère si beau... Enfin si vrai frère il était. Elle bafouilla et se racla la gorge, reprenant contenance comme elle put.

- Je te présente Linclon Alpunem Cretinus de la Motte de Terre... C'est... Euh...

La jeune femme leva les yeux vers l'homme et secoua la tête, avant de se pencher vers Dolmance, sur le ton de la confidence.

- C'est mon amoureux... mais il faut pas l'dire trop fort, il pourrait y croire...

Elle se rapprocha de Lin, son seul contact la rassurait. Leur relation était... enfin n'était pas comme les autre... Mais elle ne l'échangerait pour rien au monde. Elle se posa près de lui. Couple contenant une jeune femme au teint cadavérique et un homme à barbe...

Lin avait suivi l'échange avec un air teinté d'ironie, incapable de cacher plus longtemps son sourire en voyant Vamp s'empourprer après la chaleureuse accolade du Sieur ...
Sieur Dolmance apparemment.
Il avait fier allure et la grâce de ses gestes avait fait tiquer le jeune barbu, incapable de penser qu'il n'était qu'un simple palefrenier. Il prit alors conscience que cet homme à l'allure altière était le frère de Vamp ... Vamp qui était elle-même sa compagne, si on pouvait la définir ainsi ...
Il se sentit soudain mal à l'aise à l'idée de côtoyer des nobles, n'étant lui-même qu'un simple paysan ...
Il se râcla la gorge en entendant prononcé son nom et, légèrement rougissant, rectifia la jeune femme.

En réalité, c'est Linclon Cretinus Alpunem de la Motte de Terre ... si on fait l'inversion, on tombe de l'autre côté de la famille ... Un peu disparu ...

Prenant conscience qu'il s'immiscait dans une discussion qui ne lui appartenait pas, il recula d'un pas machinalement, signe de respect aux gens de la haute société enseigné par ses parents.
Lorsque Vamp se rapprocha de lui, il ne put s'empêcher de se raidir, se demandant s'il avait suffisamment fier allure pour prétendre au titre de compagnon.
Décidant qu'il se posait trop de questions, il soupira et se détendit.
Noble ou pas, Vamp restait Vamp. Paysan ou pas, il restait lui.
Et ce messire Dolmance, tout noble fut-il avait l'air des plus aimable.
A quoi bon se compliquer la vie alors que la simplicité était de mise ?
C'est presque en souriant qu'il effleura le bras de la jeune femme du bout des doigts, désireux de lui assurer son soutien, si ce n'était physique, du moins moral.

Dolmance sourit et serra la main de Linclon :

-Enchanté messire Linclon Cretinus Alpunem de la Motte de Terre, c'est un plaisir de vous rencontrer et de vous accueillir.

Puis se tournant à nouveau vers Vamp :

-Cela me fait vraiment plaisir de te voir et de voir que tu amène ton compagnon avec toi.

Il eut un sourire tendre :

-Il est venu le moment de vous souhaiter à tous les deux la bienvenue dans le Castel Larose. Le voyage vous a sans doute fatigué ? Que préférez-vous faire ? Souhaitez-vous rejoindre tout d'abord vos chambres, vous promenez un petit peu et découvrir par vous même les allentours ? Ou dois-je faire convoquer tout le clan Larose ?

Il eut un sourire espiègle :

-Quoique je pense qu'il vaut mieux prendre un peu de forces avant de subir une réunion de famille, avec CETTE famille là.

Il posa son unique oeil gris sur le jeune couple.C'était une vision qu'il ne s'attendait pas à voir et ... c'était une vision plaisante.
le borgne attendit alors la décision de sa soeur et du compagnon de celle-ci.

Vamp commençait à avoir froid. Elle se rapprocha de Lin, l'air de rien. Etrangement, le maître des lieux la mettait à l'aise... Enfin plus ou moins... Elle lui sourit timidement et leva les yeux vers Lin. Mais ce dernier ne semblait pas vouloir prendre de décision. L'idée que Lin était à ses côtés pour lui servir de "chaperon" lui traversa l'esprit et elle sourit intérieurement. Elle observa ses jambes pleines de poussière des chemins.

- Eh bien... Nous ne sommes pas très présentables pour... Enfin pour...

Sa phrase se termina dans un marmonnement. Elle leva les yeux pleins d'appréhension à l'édifice. Elle n'aimait pas cela. Depuis qu'elle s'était enfuit de chez elle, elle n'avait jamais remit les pieds dans de tels lieux. La jeune femme déglutit. Les monuments de pierres comme celui là étaient synonymes de prison pour elle. Elle respira profondément et releva le menton. Il était temps d'affronter certains fantômes.
Elle observa l'homme à l’œil gris qui l'observait. Au fond d'elle, elle espérait sincèrement que cet homme à l'aspect et au comportement si agréable soit réellement son frère. Mais elle était aussi persuadée que cet homme n'était pas de sa famille. C'était impossible, pour la simple et bonne raison, que son père avait été près d'elle tout au long de son enfance. Elle n'osait le dire à cet homme, et préféra garder le silence.

Dolmance sourit, c'était étrange il voyait dans le visage de la jeune fille un véritable air de famille. Tout était dans le nez, pensa-t-il, et dans l'expression, pas la couleur des yeux cela était sûr. Mais véritablement dans le nez, un nez de Larose on le reconnait entre mille.
Le borgne invita alors les deux compagnons à entrer dans le Château :

-Venez, entrez, votre chambre est prête depuis longtemps. vous la trouverez sans aucun mal au second étage, on l'appelle la chambre de Päris et d'Hélène.